LE RÉCIT DE MARIAGE DANS LA PETITE VILLE DE BEIT FOURIK Sens et signification
Issue 58
Hosny Mlitat. Palestine
Dans toutes les sociétés, le mariage est considéré comme un acte social majeur. Il s’agit en effet d’un acte d’interconnexion entre un élément mâle et un élément femelle. Dans le dictionnaire d’Ibn Mandhour il est dit que « deux entités accouplées forment des époux ». L’accomplissement de cet acte relève des comportements sociaux communs à un groupe donné. Le mariage est en effet lié à des us, coutumes et rites à la fois privés et publics, et se conforme au milieu dans lequel il a pris naissance. Il suffit à cet égard d’observer les différentes cultures à travers le monde pour comprendre que le mariage est, selon la formule d’Edward Taylor, un ’’rite’’ lié à la religion et à la culture de base, c’est-à-dire la culture découlant de la formation civilisationnelle de la société en tant que telle. Le même auteur définit la civilisation comme « ce tout complexe qui contient les savoirs, les croyances, les arts, les lois, la morale, les traditions ainsi que toute autre potentialité ou coutume acquise par l’homme du simple fait qu’il est membre d’une société. » Une telle définition met l’accent sur le fait que l’évolution humaine est fondée sur l’assimilation, le respect et le renforcement des us et coutumes par lesquels l’individu peut avancer sur la voie de la prospérité. On peut le constater, par exemple, en Europe, où chaque village a ses coutumes sacrées que les habitants veillent à préserver, les considérant comme « partie de leur formation personnelle ».
L’évolution que connaît l’ensemble de la planète n’a pas détourné les sociétés de la conservation de certains comportements primaires qui contribuent, de façon directe ou indirecte, à l’enracinement de leur « identité » existentielle. Pourtant, une telle évolution a joué un rôle dans la « transformation » du rapport de ces sociétés au patrimoine culturel. Ainsi, pour prendre un exemple, le mariage en Palestine n’est plus lié aux veillées nocturnes, aux marches au flambeau, au chant individuel, etc. Nous avons désormais droit à des chansons sur fond musical moderne, à des habits traditionnels universellement reconnaissables, à la robe blanche de la mariée, au costume noir de l’époux, aux vastes salles de fêtes, à des invités en grand nombre, etc. Mais dans ce contexte commun il y a une sorte d’« intégration » de quelques résidus des anciennes coutumes et traditions du mariage palestinien, telles que le rite du déjeuner en commun, du hammam du marié, de certaines mélopées et chansons de l’ancien temps. En somme, les progrès de la modernité ne signifient pas la destruction ou l’élimination du patrimoine mais une autre façon de l’adapter à l’air du temps.
L’objet de cette étude est la « documentation » des rites du mariage dans la petite ville de Beit Fourik, rites qui, du reste, ressemblent à ceux que l’on observe dans les autres villages, avec de petites variations au niveau de certaines coutumes et traditions. L’auteur cite ici de façon détaillée l’ensemble de ces coutumes afin d’explorer la mémoire du village palestinien et de saisir la manière dont les hommes se donnaient du bonheur à une époque complètement différente de la nôtre. Il s’agit là, comme le dit Marc Augier, de cette fameuse « halte devant les vestiges » qui contribue à conférer à l’histoire la force d’une « intuition » et une « valeur » qui en font une « icone » chargée de significations quant au poids et à l’importance du passé pour notre temps.