Revue Spécialiséé Trimestrielle

L’AUTORITE COUTUMIERE DANS LES SOCIETES TRADITIONNELLES Etude anthropologique L’exemple du ‘’groupe de conciliation’’ dans la région de Djelfa

Issue 38
L’AUTORITE COUTUMIERE  DANS LES SOCIETES TRADITIONNELLES Etude anthropologique L’exemple du ‘’groupe de conciliation’’ dans la région de Djelfa

Fatima Ezzahra Chaouya

 

L’une des caractéristiques notables de la région de Djelfa (centre de l’Algérie) est l’existence de ce groupe appelé djmâat es-solh – ‘’le groupe de conciliation’’ – ou djmâa – ‘’le groupe’’ – qui représente une forme de justice traditionnelle fondée sur une coutume héritée de père en fils. La djmâa a en effet été, à travers ses membres – ou ses wousatae (médiateurs), comme ils furent longtemps appelés – la première instance responsable de la sécurité de la société djelfaouie tout autant que de la conservation de son identité, incarnée dans les formations tribales dont elle est composée. Cette juridiction a en effet constitué l’élément structurant d’une société qui se distinguait de toutes les autres par son caractère éminemment traditionnel, son attachement à ses coutumes et sa soumission à la seule juridiction coutumière. Cette société imposait en effet à ses membres une forme de contrôle qui déterminait leur comportement en conformité avec le système social en vigueur, avec tout le patrimoine, toutes les coutumes, traditions et valeurs transmises de génération en génération qu’il suppose.

La problématique sur laquelle se fonde l’étude repose sur le décryptage de cette organisation coutumière, telle qu’elle est représentée par la djmâa dont l’auteur s’efforce de saisir la structure, les soubassements et le positionnement, dans le cadre d’une société traditionnelle ayant son système propre, le but étant de comprendre ce qui a amené jusqu’ici les individus à se plier à un tel fonctionnement coutumier et ce qui en a garanti la pérennité malgré les mutations et les progrès sur la voie de la modernité que le pays a connus, au cours de la dernière période. Issue de cette société, l’auteur a pu, à cet égard, observer de près le fonctionnement de cette juridiction. Ce qui l’a amenée à se poser les questions suivantes :

  • Pourquoi la djemâa est-elle considérée comme la marque distinctive de la région de Djelfa ?
  • Jusqu’à quel point et jusqu’à quand ce type de justice pourra-t-il se perpétuer, compte-tenu des évolutions que connaît la société et de l’existence d’une justice institutionnelle ?

Ces interrogations sont d’autant plus importantes et légitimes, au plan scientifique, qu’il s’agit d’une question sensible au regard de la société en tant que tout – question anthropologique, par excellence, dans la mesure où elle va au plus profond de la réalité sociale de la région de Djelfa et met en lumière ses principales spécificités. La djmâa relève en effet d’une mentalité enracinée au sein de la communauté mais demeurée jusque-là une sorte d’abstraction, entourée de mystère. L’auteur tente dans cette étude de déchiffrer les codes de cette société qui est la sienne, d’en percer les secrets et de lever le voile sur cette part obscure de son organisation, eu égard aux évolutions rapides d’une région en train de passer graduellement de la bédouinité à une citadinité aux complexes interrelations. Elle espère que les résultats scientifiques de cette enquête contribueront à mieux comprendre la mentalité et la nature de la société de Djelfa.

Toute Issues