L’HABITAT TRADITIONNEL DANS LES VILLAGES DES OASIS DE LA REGION DE NEFZAOUA DANS LE SUD TUNISIEN
Issue 19
Mohamed El Jaziraoui (Tunisie)
La région de Nefzaoua, qui se trouve au sud-ouest de la Tunisie, compte de nombreux témoignages matériels et immatériels de l’héritage populaire. Citons les cultures et la végétation qui constituent la richesse des vastes oasis ancestrales : celles-ci ont fourni diverses matières qui ont servi de base à de nombreuses formes d’artisanat, comme la menuiserie ou le tissage des fibres végétales.
La maison constitue l’une des principales caractéristiques du patrimoine architectural, qu’il s’agisse du tissu urbain traditionnel des villages ou de l’adaptation des formes de l’habitat à l’environnement et au mode de vie des populations. La mise en valeur des matériaux naturels disponibles dans la région joue à cet égard un rôle important, en raison de leur utilisation intensive et de leur contribution à la conception architecturale des demeures.
Le tissu urbain traditionnel des villages de Nefzaoua ne diffère pas de celui des villages qui se trouvent aux abords des oasis voisines, comme les villages du Djérid ou de la région de Gabès, pas plus qu’il ne diffère des formes urbaines des villes arabes du Moyen-Age.
Chaque village est entouré d’une muraille doublée d’une tranchée. Ces fortifications existaient encore au milieu du XIXe siècle dans le village de Bazma, alors que la tranchée qui faisait le tour de l’ancienne Kébili est devenue, en 2003, une route de ceinture. Les murailles comportent soit une seule, soit plusieurs portes selon l’étendue du village. Le village de Bichri était, par exemple, entouré d’une muraille rocheuse et comptait six portes, alors que le village de Jaziret Louhichi n’avait qu’une seule porte que l’on appelle toujours la porte de la muraille. Ces fortifications étaient, pour l’essentiel, destinées à défendre le village, en raison de l’insécurité et de l’anarchie généralisée qui régnaient, notamment au cours des XVIIIe et XIXe siècles.
Le plan des villages se fonde dans sa conception sur le centralisme. La mosquée et le souk se trouvent au point de convergence des quartiers d’habitation, comme on le voit, par exemple, dans le village du Vieux Kébili où « la mosquée avec son humble minaret se trouve au centre du village, avec sur son côté ouest la place qui tient lieu de souk et où se trouvent la plupart des commerces… » De cette place partent des ruelles plus ou moins étroites et tortueuses, d’ailleurs souvent couvertes – et, dans ce cas, les gens les appellent bortals (arcades) – pour protéger les gens de l’ardeur du soleil et des vents qui soufflent fort.
Ce réseau de ruelles permet l’exploitation maximale de l’espace disponible, l’interaction entre espace public et espace privé et le contact entre les différents quartiers. Ceux-ci se répartissent sur une base tribale autour du centre du village. Ils se caractérisent par la densité des bâtiments adossés les uns aux autres, fermés sur eux-mêmes et quasiment identiques pour la hauteur car ne comportant qu’un seul étage.
Le village compte quelques édifices publics, comme la mosquée qui se caractérise par son minaret de dimension modeste et sa superficie réduite ainsi que par les zaouïas (mausolées) qui sont nécessairement surmontées d’un dôme et se trouvent généralement à proximité de la ou des porte(s) de la muraille. Ces bâtiments ne diffèrent pas de ce que l’on trouve dans les autres régions ; ceux qui sont destinés à l’habitation ne se distinguent non plus que par de rares variantes. La maison traditionnelle est généralement liée, au plan architectural, à la culture du groupe, à la vie quotidienne des individus ainsi qu’aux données climatiques et économiques de la région.