REGARDS SUR LES PROVERBES POPULAIRES ANDALOUS
Issue 7
L es anciens rangeaient cette littérature dans la catégorie des oeuvres légères ou comiques. Ainsi les zajals (poèmes destinés à être chantés) étaient considérés par les Andalous comme des textes en vers, légers ou comiques. La communauté des lettrés – notamment dans les villes – répugnait à en assurer la transmission ou à les collecter dans des recueils, estimant que leur récitation gâterait le goût. Ibn Khaldoun affirme que l’une des raisons de ce rejet est que ces oeuvres font fi des règles de la syntaxe. Un tel mépris fut, sans doute, à l’origine de la perte de pans entiers de la littérature dialectale et du patrimoine populaire. L’intransigeance des lettrés aura donc causé la disparition d’oeuvres originales qui sont autant de témoignages précieux sur la vie et la sensibilité des hommes à des époques révolues.
Quelques esprits ouverts ont, néanmoins, fait exception à la règle, s’attachant à transmettre, de père en fils et de maître à disciple, ce patrimoine. Grâce à eux d’inestimables témoignages de virtuosité verbale et des trésors de proverbes et maximes où s’expriment des formes de la sagesse populaire sont parvenus jusqu’à nous.
Mais ce qui confère à ce legs une importance particulière c’est que beaucoup de ces textes constituent une mine d’informations sur la vie et les problèmes des gens ainsi que sur leur manière de penser et leur perception du monde. Leurs proverbes et leurs zajals sont devenus des archives vivantes et riches d’enseignements pour l’étude de la vie économique et sociale des peuples. L’auteur va même jusqu’à affirmer que : « les proverbes – en tant que document social – sont plus proches de la vérité et du témoignage authentique que tout autre legs, dans la mesure où ils expriment l’âme de la société en ce qu’elle a de particulier, du fait qu’ils émanent du peuple et reflètent son mode de pensée, ses expériences et ses tendances profondes. »
L’Andalousie fut un riche terroir de proverbes et de zajals dont l’empreinte est restée dans la parole des Maghrébins qui sont, pour une part importante, d’origine andalouse. L’auteur s’est attaché à collecter, au sein de cette parole collective, des séries de proverbes qu’il explique en s’arrêtant notamment sur le sémantisme des expressions idiomatiques, avant de leur ajouter des textes en vers ou en prose, conservés dans certaines sources historiques et littéraires, qui en prolongent l’inspiration.
Rachid Al Affaki - Maroc