LE CENTENAIRE DU PREMIER LIVRE ARABE EN SCIENCE DU FOLKLORE LA LANGUE ARABE AU SOUDAN (1923 – 2023)
Issue 63
Majdhoub Aydarus
Soudan
Les milieux culturels, académiques et médiatiques du Soudan ont été trop accaparés par les péripéties liées à la révolution qui se poursuivent sans interruption au Soudan, depuis 2018 et jusqu’à ce jour, pour s’arrêter sur un événement culturel d’importance qui ne concerne d’ailleurs pas le seul Soudan mais tous ceux qui s’occupent de la culture arabe, et en premier lieu les chercheurs et les universitaires qui travaillent dans le domaine de la culture populaire.
Cet événement est le premier centenaire de la parution en 1923, à Khartoum, chez Dar Al Maaref (La Maison des savoirs), de l’ouvrage de Cheikh Abdullah Abdulrahman Al Amin Al Dharir (1890 – 1964) La langue arabe au Soudan. Le Ministère de l’éducation a fait paraître en 1967 à Beyrouth la deuxième édition chez Dar al Kitab al lobnani (La Maison du Livre libanais) ; quant à la troisième édition, elle a vu le jour en 2005 dans le cadre des publications de Khartoum Capitale arabe de la culture. On y trouve notamment une allusion à une note de la revue égyptienne Al Hîlal qui aurait fait référence à la parution en 1922 (sic) de cet ouvrage, référence peu compréhensible quand on sait que l’ouvrage avait été imprimé pour la première fois, comme nous le soulignons, à la date de 1923. J’avais d’ailleurs pu moi-même m’en assurer, dès la fin des années soixante du siècle dernier, en lisant la deuxième édition alors que j’étais encore un élève de l’enseignement secondaire.
J’ai pu ensuite vérifier, en consultant les archives pour les années 1920 de la revue Al Hîlal, que la référence à La langue arabe au Soudan figure dans le numéro de Juillet 1924, soit le 10e numéro de la XXXIIe année de cette revue qui a vu le jour en 1892.
Nous lisons dans cette note : « L’auteur de cet ouvrage qui est en deux volumes est Cheikh Abdullah Abdulrahman Al Amin Al Dharir. Le premier de ces volumes traite des dialectes des populations du Soudan ainsi que de leurs coutumes que l’auteur fait remonter à leurs origines arabes. Le second complète les recherches développées dans le premier et s’arrête sur des échantillons de poésies écrites en arabe dialectal par des poètes du Soudan. Le contenu autant que les objectifs de cette recherche témoignent de la noblesse de l’entreprise. L’auteur a en effet fait preuve d’une grande rigueur et sa démarche n’a rien à envier à celle des folkloristes qui se sont penchés sur le patrimoine régional de différents pays d’Europe.
« En elle-même, la recherche sur la langue arabe est novatrice et l’auteur peut s’enorgueillir d’avoir ouvert la voie aux auteurs de l’Orient, Syriens ou Égyptiens, une voie dont nous espérons qu’ils mesureront à quel point elle est importante, les paroles, proverbes ou poésies populaires constituant un trésor inestimable pour l’historien qui y trouvera matière à étude pour tout ce qui concerne l’histoire de la nation arabe et les origines des peuples dont elle se compose. » Cette appréciation critique témoigne en soi du caractère pionnier de cet ouvrage, publié en 2023 par Dar al Maaref au Soudan, sous l’autorité de S. Hellilson, Professeur dans la vénérable Faculté Gordon de Khartoum, qui fut très attentif à tout ce qui concerne la culture populaire du Soudan et fit paraître de nombreux ouvrages, notamment un lexique anglo-soudanais, Le cahier Hellilson.