LE RÔLE DE LA CULTURE MATERIELLE DANS LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET SOCIAL
Issue 38
Dr Youssef Hassan Madani
Chef du Département des études folkloriques
Université de Khartoum
Il incombe aux musées d’aider le citoyen à acquérir une vue d’ensemble des réalités socioéconomiques de son propre environnement. Mais cela implique une action qui soit menée, hors des structures institutionnelles de l’éducation, pour faire accéder les visiteurs au savoir et à l’éducation, et à opérer un retour vers cet échange des connaissances sur l’histoire, les sciences, la culture moderne du pays qu’offrait, loin des cadres officiels, l’enseignement traditionnel. De par son caractère participatif, ce type d’enseignement, encore fort répandu en Afrique, met en effet le savoir à la portée de tous. C’est donc par lui que le musée peut jouer le rôle essentiel qui lui revient dans nos sociétés pour faire connaître l’histoire et les événements qui y sont liés ainsi que les inventions et les créations réalisées par le peuple.
L’enseignement se fonde toujours sur un rapport de confiance entre celui qui sait et celui qui a besoin de savoir. Pour le musée, il met essentiellement l’accent sur :
1 – les expériences vécues qui expliquent l’histoire des connaissances à travers les acquis et le lieu car tout acquis est un produit émanant directement du lieu avec toutes ses composantes, sociales, économiques, politiques, naturelles, perçues sous les espèces du cumul historique ;
2 – la capacité d’analyse et d’évaluation ;
3 – la flexibilité et la capacité à induire une attitude ou un esprit critiques ;
On peut à cet égard prendre l’exemple de la pioche qui est une forme universelle présente en des points du monde aussi divers que : Java, Pékin, Senja, le Centre de l’Europe… soit des lieux qui, à l’âge de la pierre, ne pouvaient avoir aucune communication les uns avec les autres. Cet outil est pourtant apparu dans ces différentes régions sous la même forme et à des époques différentes. C’est en soi la preuve que les hommes ont reçu en partage les mêmes capacités cérébrales, ce qui frappe d’inanité toute hypothèse sur la supériorité de telle race et l’infériorité de telle autre. On peut même aller plus loin et affirmer que cela signifie que l’homme est un comme Dieu est Un, et que l’unicité divine s’affirme dans l’unicité de la créativité humaine.
Le musée est lieu de questionnement et d’incitation aux interrogations. Dès lors que le visiteur regarde les objets exposés, le musée devient un espace d’apprentissage et d’éducation propre à développer l’esprit d’initiative et de dialogue et à diffuser le savoir parmi les différentes catégories de la population, d’autant plus qu’il dispose non seulement des richesses qui sont exposées mais aussi des moyens audiovisuels, voire des stimuli gustatifs ou olfactifs (parfums, essences diverse, encens…) qui les accompagnent. Le musée est également une sorte de forum où s’échangent les idées et les expériences. Il agit à travers cette forme d’enseignement neuf, actif, direct et accessible qu’il prodigue, à moins qu’il ne faille le percevoir comme une recomposition de l’institution scolaire officielle car s’il ne s’inscrit pas dans la continuité du système scolaire qui est un système pyramidal, il constitue un système horizontal englobant tous les âges, toutes les catégories sociales, les femmes aussi bien que les hommes.
La matière que l’auteur a pu recueillir sur Internet en rapport avec la stratégie de promotion des métiers traditionnels l’a convaincu que l’artisanat joue un rôle important dans le développement des sociétés, dans la mesure où il contribue à la réalisation de nombreux objectifs tels que :
1 – augmenter les revenus réels des sociétés rurales : montagnards, habitants des zones désertiques ou côtières, éleveurs ou agriculteurs qui, tous, vivent dans le cadre d’une économie de subsistance (produits alimentaires, mobilier, bâtiment traditionnel…) ;
2 – ancrer, sur le plan local, la culture de l’autosuffisance, les métiers traditionnels se fondant sur les matières premières disponibles et une bonne connaissance des matériaux locaux ;
3 – renforcer la stabilité sociale en incitant les catégories sociales les plus défavorisées à se tourner en priorité vers les activités artisanales, ce qui ne peut que contribuer à limiter les écarts sociaux sous toutes leurs formes ;
4 – offrir des opportunités d’emploi à des femmes qui ne peuvent, en raison de diverses contraintes, accéder à des emplois dans le secteur formel, les métiers à domicile constituant à cet égard la meilleure des orientations.