Revue Spécialiséé Trimestrielle

LES METIERS MANUELS DANS LES CONTES SYRIENS

Issue 15
LES METIERS MANUELS DANS LES CONTES SYRIENS

Ahmad Ziad Mohbek ( Syrie)

L’étude porte sur le rapport entre le travail manuel et le conte populaire. L’auteur définit brièvement ce travail en le distinguant des autres professions. Il définit également le conte avant de passer en revue les formes et manifestations des métiers manuels dans les contes populaires en les classant en cinq catégories :

 les contes faisant l’éloge du métier ; les contes faisant la satire de certains métiers ; les contes conférant au métier une valeur ou une philosophie ; les contes sur les femmes au travail ; et enfin les contes critiquant l’absence de métier. L’auteur met ensuite Chaque conte est brièvement résumé, analysé et documenté. Le résumé est donné non pas dans le dialecte d’origine mais en arabe littéral, la valeur du récit résidant dans sa structure et ses différents éléments constitutifs plutôt que dans son élaboration linguistique. Seuls font exception les proverbes, plus difficiles à rendre en arabe classique.
Le conte est une des formes du patrimoine populaire. Il est transmis oralement, de génération à génération, en gardant sa structure générale ainsi que ses constituants fondamentaux qui se répètent d’un conte à l’autre et représentent autant d’unités structurelles ou motifs. L’inventeur ou, si l’on préfère, le premier auteur du conte n’est pas connu. Car il s’agit d’une production cumulative, œuvre d’anonymes, enfants du peuple doués d’un réel talent de conteurs.
Le conte subit le plus souvent des transformations : telle péripétie est avancée, telle autre retardée ; ce n’est pas un texte fixé à jamais dans sa forme ou dans un style uniques ; le style ne cesse d’évoluer, avec des réductions, des adjonctions, des affinements, des relâchements, au gré du talent et des performances stylistiques  du conteur. La langue est le dialectal du pays où le récit est raconté. On a pu noter une grande similitude entre les contes, notamment dans les pays arabes, mais aussi, fort souvent, dans d’autres pays du monde, si bien que l’on peut penser à une matrice unique ou se demander si ces récits n’ont pas fait partie de ces échanges que la guerre, le commerce, les voyages ont perpétué entre les peuples, au long des siècles. Ni le temps ni le lieu ne déterminent la forme ou le contenu du conte, lequel est moins concerné par les détails ou les informations contingentes que par l’enseignement et la valeur éthique qui sont porteurs d’une vision émanant de la sensibilité populaire.
Les contes traitant des métiers manuels sont, à la vérité, peu nombreux, surtout lorsqu’il s’agit de définir de façon précise un métier exigeant  l’utilisation de tel ou tel outil, tel que celui de boucher, de forgeron, de couturier, de coiffeur, de tisserand ou de fileur. L’auteur a à cet égard écarté les contes traitant de professions ou fonctions telles que celles de juge, de médecin, de maître d’école, de marchand, de prince, de ministre ou de roi, sachant que ces contes sont bien plus nombreux que ceux consacrés aux métiers manuels. Il est à noter aussi que la plupart des contes évoquant les métiers manuels n’ont pas pour objet le métier en soi, mais visent à développer une idée, un enseignement en mettant l’accent sur la valeur que représente ou peut représenter le métier à l’intérieur du récit.
Telle est, de façon générale, la nature du conte. Mais l’auteur a pu s’arrêter sur un petit nombre de contes où le métier en tant que tel revêt une signification particulière. Il constate que la plupart de ces récits font l’apologie du métier dont ils traitent ; on rencontre même des contes qui mettent en garde contre le fait de ne posséder aucun métier, exhortant leur auditoire à en acquérir un, quel qu’il soit. Les métiers « féminins », notamment le filage du coton, sont mis en valeur dans nombre de contes qui représentent le travail de la femme comme une forme de délivrance et de réalisation de soi.
L’auteur souligne le caractère sérieux de la plupart des contes traitant d’un métier. Ces contes ont le plus souvent une fin heureuse. En revanche, et si l’on excepte les célèbres contes et anecdotes satiriques de Jha (Goha), qui constituent un corpus à part, très peu nombreux sont les contes qui tournent en dérision un métier.

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