LES ORGANISATIONS ARTISANALES TRADITIONNELLES Une approche fondée sur le genre social
Issue 45
Youssef Bouataoun
L’étude souligne l’importance de l’égalité entre les deux sexes à l’intérieur des organisations artisanales traditionnelles en abordant la question sous l’angle de l’analyse socio-anthropologique. L’auteur essaie de pointer les principaux obstacles qui se dressent devant le renforcement des capacités des artisanes, les empêchant de développer un potentiel objectivement entravé et de jouer le rôle qui leur incombe dans la promotion du secteur des métiers traditionnels et la réalisation de leur indépendance.
L’étude souligne que l’accès des femmes à des professions artisanales dominées par les hommes a été et continue d’être tributaire de trois facteurs essentiels. Le premier, qui est aussi le plus décisif, est d’ordre économique : il est lié pour l’essentiel à la pauvreté, à la rareté des offres d’emploi et à la cherté de la vie qui ont poussé les femmes à investir la sphère de l’artisanat. Le second facteur est d’ordre culturel : il ressortit au désir de beaucoup de femmes de dépasser les représentations stéréotypées et traditionnalistes des rôles et professions auxquelles les femmes étaient confinées, et traduit en même temps la volonté des femmes de prouver leur capacité à travailler avec sérieux et compétence, là où cette capacité est entravée. Le troisième et dernier facteur est lié aux mutations socioéconomiques et aux dynamiques de la mondialisation, lesquelles ont introduit dans les domaines de la fabrication et de la production de nouvelles techniques et technologies qui ont contribué à une plus grande participation des femmes à certains métiers dont elles étaient absentes à cause du grand effort physique que de tels métiers exigeaient auparavant.
L’étude se réfère aux commentaires et représentations des familles et des artisans relativement au travail manuel des femmes qui ont constitué en eux-mêmes les principaux défis auxquels les femmes se trouvaient confrontées. Elle passe ensuite en revue les autres difficultés sociales et culturelles rencontrées par les femmes avec lesquelles l’auteur a effectué des entretiens sur leur lieu de travail. Ces difficultés sont le plus souvent liées aux croyances et traditions qui consacrent la discrimination entre les deux sexes, ainsi qu’à la difficulté qu’éprouvent beaucoup de femmes à trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. C’est cette entrave qui a constitué le plus grand défi pour les femmes en ce qui concerne l’affirmation de leurs compétences et de leur maîtrise professionnelle et leur participation efficiente à l’action menée par les organisations artisanales traditionnelles.
L’étude s’achève par l’évocation d’un ensemble de problématiques qui méritent d’être approfondies afin de dépasser les représentations stéréotypées qui freinent le processus de libération de la femme et l’instauration de l’égalité face à la distribution des rôles autant qu’elles font obstacle à l’établissement d’une division équitable du travail artisanal entre les deux sexes. Les questions essentielles relèvent, ici, de la nécessité de répondre au défi des rôles traditionnels, d’un côté en œuvrant à augmenter le nombre de femmes exerçant des métiers jusqu’ici dominés par les hommes, et d’un autre côté, en insistant sur la nécessité pour les artisanes de croire en elles-mêmes et au rôle positif qu’elles jouent dans le développement du secteur des métiers traditionnels.