Les Nouvelles Tendances De La Poésie Populaire Irakienne
Issue 8
Les critiques littéraires estiment que la littérature de cette époque est tombée à son niveau le plus bas, excepté quelques rares créations lumineuses, oeuvres de poètes qui ont su conserver l’art du vers et la forme traditionnelle de la qasida (poème respectant les canons de la métrique arabe), même si leurs oeuvres ne furent pas totalement dénuées des influences de cette poésie de l’âge du déclin.
Cette période connut, par contre, une efflorescence de la poésie populaire versifiée, dans ses diverses formes. Cette poésie, très répandue dans les milieux populaires, notamment en Irak, s’est affirmée avec force, comme si elle prenait une revanche sur la « grande » poésie et voulait l’inciter à renouer avec son glorieux passé.
Le poème en vers réguliers se présentent, au départ, sous la forme d’une suite de quatrains, puis de quintiles avant d’évoluer vers des structures strophiques de six puis de sept vers, cette dernière forme ayant par la suite pris le nom de mawwal al zahîri. Ces poésies populaires étaient alors appelées les sept arts de la poésie « dialectale », c’est-à-dire de la poésie dont le substrat linguistique se situe hors des règles de l’arabe littéral. Les « altérations » du dialectal y apparaissaient en effet
clairement et ont du reste été recensées par le poète Safieddine Al Haly (677-750 H. / 1277-1349).
La poésie populaire est plus proche des gens du peuple qui sont plus disposés à la mémoriser et à en multiplier les inventions car ils se plaisent à l’entendre et à en varier l’expression. Cette poésie est présente à tous les moments de leur existence. On peut même affirmer en toute certitude qu’elle est davantage enracinée dans leur culture que dans celle des élites sociales, et il n’y aurait pas exagération à la classer sous la dénomination de poésie a’mmi (des couches populaires), ce qui signifie que cette poésie constitue un élément essentiel de l’identité des gens du peuple et un facteur de cohésion sociale, à toutes les étapes de la vie de ces gens.
Cette poésie est également devenue le meilleur porte-parole de tous ces hommes et femmes, dans tous les événements et circonstances qui affectent leur existence. Et c’est cela autant que le rôle primordial que ces couches sociales jouent dans la sauvegarde et la promotion de ce patrimoine, inséparable des évolutions qui touchent l’ensemble de la société, qui les distingue des élites. En d’autres termes, la dynamique de la créativité dans la poésie populaire irakienne est plus puissante et la diversité des formes poétiques plus importante que celles que connaît la poésie classique.
Dr. Kahaïrallah Saïd (Irak)