Revue Spécialiséé Trimestrielle

L’ART DE LA ‘ARDHA DANS LES JOURS DE FÊTE AU BAHREÏN

Issue 27
L’ART DE LA ‘ARDHA DANS LES JOURS DE FÊTE AU BAHREÏN

Art fondé sur la démonstration de force, al ‘ardha (la parade)  est connue dans la Presqu’île arabique depuis les temps les plus anciens, comme en témoignent de nombreux textes poétiques. Le mot lui-même est dérivé d’al ‘ardh qui désigne un grand rassemblement de soldats, mobilisés en prévision d’une guerre. Il était fait appel à ces forces armées à chaque fois que le pays ou la tribu étaient menacés par un autre pays ou une autre tribu. Les préparatifs militaires consistaient en diverses parades qui sont autant de démonstrations de force visant à insuffler aux soldats un surcroît d’ardeur et de courage à la veille d’un affrontement. L’une des fonctions les plus importantes de la ‘ardha était de former les enfants de la tribu au maniement de l’épée, la guerre étant faite de duels où le cavalier était appelé à affirmer sa suprématie dans l’art de manier l’épée et le bouclier. Al ‘ardha était donc une scène, un lieu où le soldat recevait un entraînement pour apprendre l’attaque à l’épée et la défense au moyen du bouclier, ce qui exigeait à la fois souplesse  et capacité à se fondre dans le groupe pour défendre la communauté.

 

Al ‘ardha fait, en outre, partie des arts les plus anciens du patrimoine. Liée aux célébrations les plus importantes, elle constituait une exhibition, un exercice viril particulier aux populations du Golfe. On dit aussi qu’elle fut à l’origine une parade masculine à caractère belliqueux que les tribus organisaient, dans le passé, à la veille mais aussi au lendemain de la guerre.

Rémanence des préparatifs militaires que les tribus effectuaient, à l’époque antéislamique, avant de s’engager dans un conflit, al ‘ardha aurait vu le jour dans la région de Nadjd, et plus précisément chez les fameuses tribus des  ‘anza dont descendent les actuelles familles régnantes du Golfe, telles que les Al Khalifa, les Soubah ou les Saoud.  Al ‘ardha se serait ensuite étendue à l’ensemble des pays du Golfe à la suite de la migration de certaines tribus, lesquelles en changeaient l’appellation, d’une région à l’autre. Ainsi, au Bahreïn comme au Koweït et au Qatar, cet art a gardé son ancien nom de ‘ardha ; en Arabie saoudite on distingue la ‘ardha du Nedjd de celle du sud (al ‘ardha al janoubia) qui est spécifique au Hedjaz et au sud de l’Arabie et qui se caractérise par la rapidité des mouvements et du rythme mélodique. Les Emirats l’appellent al ‘iyala ou al razif, dénomination qui existait auparavant au Bahreïn. Au Sultanat d’Oman elle est connue sous le nom d’al razfa.

La célébration d’al ‘ardha est une tradition pérenne. Les hommes se font face en deux rangées distantes l’une de l’autre ; ces rangées s’appellent les  chiyala ; elles ont pour vis-à-vis un homme appelé chiyal qui leur fait répéter un poème ; sont également présents des musiciens qui donnent le rythme à la parade en jouant du tambour et du tambourin. En fait, les instruments de percussion varient d’une région à l’autre : ainsi, au Bahreïn comme au Qatar, on se sert du teyran, du touss et de deux tambourins, alors qu’en Arabie Saoudite on utilise le tabl nouçayfi qui est un semi-tambour que l’on attache à une main et que l’on frappe de l’autre. Une des deux rangées est consacrée au maniement des armes à feu que l’on appelle maqamy’a ou tefjen (ce qui sert à réprimer) et qui sont de vieilles carabines héritées des temps anciens. Cette rangée reçoit ses ordres d’un homme que l’on appelle ra’yi al m’aqouda (le guide de la chaîne). Au milieu se tiennent les artistes qui jouent de l’épée lors de l’exécution du razif, qui est, précisément, la danse de l’épée.

khaled Khalifa
Bahreïn

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