Revue Spécialiséé Trimestrielle

UNE INTRODUCTION AU MAQAM PENTATONIQUE L’artiste amazigh El Hadj Belaïd et sa troupe musicale

Issue 18
UNE INTRODUCTION AU MAQAM PENTATONIQUE L’artiste amazigh El Hadj  Belaïd et sa troupe musicale

Mohamed Blouch (Maroc)

Le maqam (mode) pentatonique comporte cinq tons, et se distingue de l’échelle heptatonique diatonique tempérée. Ces tons sont : do, ré, mi, sol, la ; ils partent du registre grave. Ce mode a donc deux degrés de moins que l’heptatonique, mais l’absence de ces degrés de l’échelle pentatonique ne donne jamais a l’auditeur un sentiment de manque ou de carence, au niveau de la mélodie ou de la composition des phrases mélodiques.

 

L’intervalle joue, ici, le même rôle que dans l’échelle heptatonique. Il est appelé intervalle constant, ce qui signifie qu’il définit, selon la théorie tonale, le type de mode. Si l’intervalle est petit (un ton et un demi-ton ou un degré et un demi-degré), l’échelle est apparentée au mode mineur ; s’il est grand (deux tons ou degrés) l’échelle est apparentée au mode majeur. L’intervalle revêt donc une très grande importance dans la composition de cette échelle et confère une grande diversité aux échelles musicales, sous leurs différentes formes.
Pour le cinquième intervalle, il n’a pas moins d’importance que le troisième. Cet intervalle est appelé dominant, ce qui signifie qu’il exerce une domination particulière sur le maqam. Il est le cœur de l’échelle tonale et peut être considéré comme le point de départ de la deuxième partie de l’échelle – en fait le point de passage vers une autre échelle sur une autre mélodie. Il s’agit là d’un trait distinctif de l’échelle pentatonique, laquelle peut utiliser le cycle des quintes pour le changement tonal.
Le cycle des quintes est attribué à Pythagore, même si de nombreuses civilisations anciennes l’ont connu car il était en usage bien avant que d’être théorisé. Les études récentes ont, du reste, permis de l’analyser et d’en percer les secrets les plus essentiels.
Tels sont les avantages qui ont permis de conserver cette échelle, c’est-à-dire ce système penta tonal, qui constitue aujourd’hui un phénomène mondial. Il y aurait erreur à attribuer ce mode à telle étape de l’histoire ou à telle région du monde. Sa trace est attestée dans la musique des temps les plus reculés, celle des Sumériens, celles de l’époque pharaonique, de la Chine ou du Japon anciens, etc. On le retrouve dans les musiques populaires les plus authentiques du Maroc (celle des Amazighs), en particulier au sud du Maroc où il porte en général l’un de ces trois noms : achleuh, aknaw ou ama’kkel.
L’échelle pentatonique constitue le dénominateur commun des mélodies des musiques les plus répandues dans la plupart des régions du monde. Présente en Afrique et au sud-est de l’Asie, on la retrouve également en Europe de l’est et en Grèce, certaines maqamat (pluriel de maqam) arabes y ont recours et elle est à la base de certaines formes de musique classique américaine.
Si l’on pouvait procéder à des recensements, on verrait que la moitié de la population de la planète est familière de ce mode.
On a fort souvent recours à ce type de maqam au Maroc, dans la presqu’île arabique et dans les pays du Golfe. Citons, ici, le maqam du Dhil et celui dit ‘Iraq que l’on utilise en Tunisie, en Libye et à Ispahan, celui du a’ch chak qui est pratiqué au Maroc, à côté des maqamat nawa, raml edh dhil, rast edh dhil et mazmoum.
Un ensemble de pays d’Extrême-Orient ont adopté le mode pentatonique, tels que : la Chine, le Japon, la Corée ou la Mongolie, ainsi que des pays du sud-est asiatique, tels que : la Birmanie, la Thaïlande, le Laos, le Cambodge, le Vietnam, la Malaisie, l’Indonésie, les Philippines, auxquels s’ajoute l’Inde.
Il reste que chaque pays a conservé sa spécificité mélodique et rythmique.
Le mode pentatonique a également été adapté dans musiques d’Europe et des Etats-Unis. Il est présent dans différents types de mélodies ainsi que dans les improvisations et les chansons. Les tsiganes d’Europe de l’est l’ont utilisé, et il n’a pas manqué d’inspirer de grands compositeurs, comme Debussy et Dvorak.
Ce mode est passé d’Afrique en Amérique, dès le XVè siècle. Il a marqué le blues et le jazz. Il s’est étendu, au XXè siècle, au rythm and blues, au be bop, au hard rock et au rock n’roll.
Dans toutes ces musiques, le mode pentatonique se répartit en modes majeurs et modes mineurs.

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