Revue Spécialiséé Trimestrielle

LA FEMME ET L’HERITAGE MUSICAL DANS LA PETITE VILLE D’EL GDAH AU NORD OUEST DE LA TUNISIE

Issue 37
LA FEMME ET L’HERITAGE MUSICAL DANS  LA PETITE VILLE D’EL GDAH  AU NORD OUEST DE LA TUNISIE

Naouel Jilali. Tunisie

 

La petite ville d’El Gdah se trouve au nord-ouest de la Tunisie, à près de 250 kms de la capitale, loin au sud de la ville du Kef, dont elle est distante de 90 kms. Elle est au centre d’un triangle avec, d’un côté, la ville de Kalaa el Khisba ( littéralement : « la forteresse fertile », cette ville s’étant appelée avant l’indépendance du pays Kalaa al Jarda – « la forteresse aride »), d’un deuxième côté de la ville de Kalaat Sinan (« la forteresse de Sinan Pacha », également connue sous le nom de Kalaat al Asnam, « la forteresse des statues », ou de Kalaat Essikka, « la forteresse de la voie ferrée »), qui est à 15 kms, et d’un troisième côté, la frontière algérienne.

El Gdah est une bourgade agricole entourée de terres fertiles et de montagnes. Ses habitants sont des paysans (grandes cultures et élevage des ovins) qui mènent une vie simple, guère éloignée de celle des populations amazighes, les premières à s’être établies dans cette région du pays. L’héritage culturel de ces agriculteurs et éleveurs est en fait leur seul divertissement, héritage dont il ne faut pas oublier à quel point il a bénéficié de la position stratégique d’Al Gdah, qui est étroitement liée à l’Algérie voisine, comme on le voit à la variété et à la multiplicité des manifestations festives qui scandent son existence.

Ce patrimoine culturel qui réside, pour une part essentielle, dans la chanson populaire, a constamment été un trait d’union entre la passé et le présent. Grâce à la mémoire des récitants ce patrimoine nous est parvenu en conservant son identité et son authenticité. « Est patrimoine, écrit Hassan Hanafi tout ce qui, à l’intérieur de notre civilisation présente, nous vient du passé. » Le passé est en effet, là, avec ses us et coutumes, il ne cesse d’actualiser à nos yeux de la façon la plus précise toutes les formes d’expression de la vie quotidienne, avec ses joies et ses fêtes, telle qu’elle fut vécue par les populations ancestrales.

La plupart des chansons populaires d’El Gdah sont liées à des récits, certains véridiques et nous réfèrent à des faits historiques, d’autres relevant de la pure imagination. Les paroles de ces chansons, qu’elles soient en arabe littéral ou en arabe dialectal, qu’elles trouvent leur origine dans un récit ou dans uns scène vécue, nous renvoient soit à une fiction soit à une expérience dont il naît une forme de méditation sur tel ou tel aspect de al vie vécue. L’auteur a acquis lors de son enquête sur ce type de chanson populaire la certitude qu’elle ne peut faire l’économie du passage par le conte qui plonge ses racines dans la mémoire des populations qui les ont transmises au long des siècles et qui assume de nombreuses fonctions dont l’une des plus importantes est la révélation de secrets que les habitants du village ont voulu nous communiquer au moyen de la chanson. Celle-ci présente en effet un ensemble de formes significatives des comportements, du mode de vie, du niveau d’évolution des populations d’Al Gdah.

Ce qui distingue, en premier lieu, telle région de telle autre ce sont ces us et coutumes qui dessinent de nombreux aspects et soulignent les spécificités sociales et culturelles de la communauté qui y vit. Les grandes occasions, les festivités et les cérémonies de mariage jouent à cet égard un rôle important dans la détermination de cet ensemble de réalités et de manifestations qui font qu’Al Gdah diffère de telle région du pays et ressemble à telle autre. Al menjema que l’on retrouve dans beaucoup d’autres régions constitue l’une des plus importantes traditions festives de ce village, et peut-être même la plus importante dans la mesure où elle est pratiquée lors des cérémonies de mariage ou de circoncision.

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